Invitée par l’IPES Tournai, Maryse Roméo, victime de violence conjugale, est venue partager son expérience et son vécu au sein de la classe de 6e coiffure. Une histoire bouleversante, déconcertante qu’elle a souhaité livrer aux jeunes aux côtés des deux intervenantes de la police de Tournai qui dit-elle « m’ont sauvée et m’ont maintenue en vie ».
Comme l’explique d’entrée de jeu Stéphanie, Inspectrice de police au service intervention : « La violence conjugale, c’est notre quotidien et cela concerne tout le monde. On en parle pas assez mais justement c’est en diffusant l’information, en prévenant les services de police que nous pourrons aider les gens ». Elle était présente le jour où la vie de Mme Roméo a basculé.
C’est dans cette optique que Maryse Roméo, questionnée par l’assistante policière aux victimes a expliqué comment pour elle « au départ d’une très belle histoire d’amour, tout s’est terminé très mal », entre la vie et la mort.
L’histoire de Mme Roméo débute par une rencontre avec son futur mari à 16 ans. Un amour passionnel interrompu par un déménagement mais qui est retrouvé plusieurs années plus tard alors qu’elle est agent pénitentiaire et que lui est incarcéré. C’est alors qu’elle quitte tout pour l’épouser.
« Les premiers signes de violence apparaissent deux semaines après sa libération lorsque je lui organise une fête d’anniversaire à laquelle j’ai invité ses anciens collègues. Le fait même de les avoir contactés a été pour lui un total manque de respect. S’en suivent des cris, des bris de portes, c’est là que je commence à avoir peur. Je m’adapte à son état d’esprit, à son niveau de colère, je m’excuse sans arrêt pour des choses que je ne fais pas. Lui aussi demande pardon à son tour, il m’offre des fleurs, des bijoux, c’est ce qu’on appelle « l’effet lune de miel » et puis le cycle violent recommence… » explique-t-elle.
Malgré des mises en garde, Mme Roméo cache la situation à ses proches. Néanmoins, c’est à sa coiffeuse qu’elle va se confier pour la première fois, sans pour autant vouloir porter plainte.
Six mois plus tard, en décembre 2020, elle est forcée d’appeler la police car son mari est violent devant ses deux enfants. « Il sera arrêté ce jour-là, mais je ne dépose pas plainte. Je suis amenée chez le médecin, mais je nie tout» confie-t-elle.
Sous emprise, Maryse s’est inventée une autre vie. Elle change de comportement, de tenue vestimentaire, ne se maquille plus - elle qui à la base est très apprêtée -, pour tenter d’apaiser les tensions. Jusqu’au jour où elle a accéléré les choses pour le quitter et l’a persuadé de prendre un kot pour vivre séparément le temps que les choses s’arrangent.
Il n’accepte pas la situation et à plusieurs reprises, « en novembre 2021, il revient à mon travail pour m’humilier, chez moi pour tout démolir puis le jour où il s’en est pris pour la première fois à mon visage et où j’ai continué à mentir à la police».
Il a honte, il part pendant 3 mois mais Mme Roméo sait qu’il va revenir. La première fois avec une demande d’aide en argent, et la seconde une aide qu’il apportera dans les travaux et qu’elle acceptera.
Mais en avril 2022, tout bascule. Maryse a failli mourir à cause de la violence et de la force des coups portés par son mari. « Je suis passée à côté de la mort, par une toute petite porte ».
Désormais, elle s’est engagée dans une démarche de reconstruction, et surtout une volonté d’en parler, de faire de la prévention et de faire avancer la lutte contre les violences faites aux femmes.
En guise de message de conclusion fort qu’elle veut livrer aux élèves, elle leur dit : « Dès la première gifle, ce n’est pas normal, il faut partir ! En étant jeune, vous n’êtes pas bloqués dans une situation, la première gifle est une ouverture à autre chose, c’est important de le comprendre avant de tomber sous emprise. »
Elle reviendra tout au long de l’année pour amener son témoignage et son message de lutte contre les violences à l’ensemble des classes de l’IPES Tournai. Comme une aidante de première ligne, à l’issue des deux premières interventions en classe, elle a été à l’écoute des jeunes et parfois de difficultés auxquels eux aussi font parfois face au quotidien.
« Une telle sensibilisation face à tous types de violence est très important pour nos jeunes. Comme en témoigne Mme Roméo, en discuter, se confier peut faire partie de la solution pour se faire aider » conclut Isabelle Mercier, directrice adjointe de l’IPES Tournai.